La sensualité des livres

La chaine de télévision Arte a diffusé le dimanche 25 octobre après-midi un excellent documentaire de Katja Duregger (Allemagne, 2016, 51 mn), produite par Tag/Traum Filmproduktion Köln : la sensualité des livres. Katja Duregger pose la question de l’existence et de l’avenir du livre à l’heure du numérique, de l’internet et des liseuses et autres e-books.

Katja Duregger suit sur leur lieu de travail des professionnels et créateurs de livre : l’imprimeur Gerhard Steidl, également éditeur et fondateur avec Karl Lagerfeld de la maison LSD, le graphiste britannique Jon Gray, formidable créateur de couvertures originales, l’éditeur français Gérard Berréby, éditions Allia, Rainer Groothuis, designer allemand et créateur de livres, Bernard Granger, dit Blexbolex, artiste français vivant à Leipzig, ex capitale est-allemande du livre aujourd’hui spécialisée dans les imprimeries d’art, et la célèbre graphiste néerlandaise Irma Boom, qui construit ses maquettes de livres à la main.

Arte, La sensualité des livres (capture d’écran du documentaire)

La caméra de Katja Duregger saisi les mots et les gestes de tous ces artistes, ainsi que la matière du livre, de ses composants et de son processus de fabrication : la texture et l’odeur du papier, des encres, la couleur et la composition de l’objet, ses volumes, tout en insistant sur ce qui fait la particularité de ce bel objet qu’est le livre : sa sensualité.

Arte, La sensualité des livres (capture d’écran du documentaire), Gerhard Steidl

Sur le travail de l’édition, voici les mots de Gérard Berréby, véritable hymne à la qualité auquel Escourbiac l’imprimeur adhère volontiers :

Nous faisons un travail industriel, mais nous le faisons de manière artisanale, et nous aimons ce que nous faisons. Il y a l’amour de l’objet que nous réalisons. Donc on ne peut pas mal le faire, on ne peut pas le bâcler, et ici à chaque jour et à chaque nouveau livre, tout le monde  tente de se surpasser, d’innover et de ne pas renouveler ce qu’elles ont fait la veille.
– Gérard Berréby, éditions Allia

Tous ces professionnels créateurs de livres sont d’accord pour affirmer que le livre a encore un avenir certain sur le marché de la connaissance. Rainer Groothis insiste sur l’importance de l’esthétique de l’objet et sa singularité. « Si on propose des livres au contenu et à la forme interchangeable pour un prix modique, on assistera à terme au développement du support numérique, c’est évident. Pour ces livres-là, il n’y aura aucune raison de ne pas acheter la version numérique. »

Arte, La sensualité des livres (capture d’écran du documentaire)

La graphiste Irma Boom insiste elle sur le rôle et la continuité de l’objet livre, en opposition au flux numérique, constant et éphémère : « une fois que le livre est relié, il constitue une continuité définie et ordonnée, et je pense que cet aspect va devenir de plus en plus important. Il s’oppose au flux continu d’informations que l’on trouve sur le net, où on peut modifier un contenu en permanence. On ne peut pas changer le contenu d’un livre. »

Finissons la revue de La sensualité des livres avec l’optimisme de l’imprimeur allemand Gerhard Steidl :

La beauté du livre, et la transmission d’un contenu sous la forme d’un livre sur un support papier ne s’arrêtera jamais. Plus j’évolue dans le monde numérique, plus je trouve qu’en fait le livre est un objet simple, pratique et bon marché.
Gerhard Steidl, éditeur et imprimeur

Arte, La sensualité des livres (capture d’écran du documentaire)

Le documentaire La sensualité des livres de Katja Duregger a été diffusé sur Arte le dimanche 23 octobre 2016 à 17h. Il est visible en replay sur Arte + 7 du 24 au 30 octobre 2016.